dimanche, mars 20, 2005

Peer to peer et téléchargement légal

J'ai assisté hier à la présentation de thèse de Sylvie, ma 'filleule' de mastère, qui parlait des nouveaux modèles de vente de musique en ligne. Présentation fort intéressante, où nous avons eu l'occasion d'aborder tous les aspects de ce débat.

J'ai aujourd'hui l'impression d'y voir beaucoup plus clair ! L'affrontement idéologique entre les tenants du modèle "tout gratuit", ceux du modèle "payant" et les journalistes a permis de passer en revue un peu tous les aspects du problème...


En résumé, voilà une mini-synthèse :

LE VRAI PROBLEME :

Les maisons de disque n'ont pas vu venir la vague de l'Internet et sont restés sur leur métier premier qui est la vente de 'galettes' (vente de CD audio) au lieu de se positionner sur leur métier de demain : la vente de musique, avec tout ce que ça implique dans le changement de mentalité... Par exemple, s'il n'y a qu'un ou deux titres de valables dans un album, les gens n'achèteront plus les douze autres qui ne valent pas un clou... Donc fini le 'remplissage' d'album artificiellement 'tiré' par un single poussé par de la promo à outrance sur les radios FM !
Comme le consommateur peut facilement écouter un échantillon avant d'acheter, fini la pure tactique marchande, il faut priviliégier la qualité.

L'argument rabaché par les maisons de disque "le Peer-to-peer tue la créativité" ne tient donc guère la route, car c'est plus les elles qui refusent à aujourd'hui d'adopter une mutation de leur métier qui privilégiera la qualité à la quantité !

C'est un peu comme FT qui faisait un lobbying d'enfer avant 97 pour fustiger les méfaits du "grand satan Internet, où l'on retrouve piratage et pornographie" (et on pouvait voir quelle influence pouvait avoir FT à l'époque à travers les médias qui reprenaient TOUS la même rengaine, jusqu'à ce que -bizarrement- un beau jour, tous les médias se mettent à dire que l'Internet c'est super ! Marrant, FT venait juste de consolider son offre Internet FAI et Pro...).

L'état ne sait pas trop par quel bout prendre le problème, entre le lobbying des maisons de disque et le mécontentement des internautes. La loi sortie de taxation sur les supports est injuste, car elle taxe tout le monde, y compris les utilisateurs qui ne téléchargent rien !!! Cela revient à considérer que 'par défaut, on est un pirate', foulant au passage au pied la présomption d'innocence qui est pourtant une des clés de notre système judicaire !

AUJOURD'HUI :

Depuis août 2004, la loi est assez claire et interdit le téléchargement illégal. Les premiers procès -même si une jurisprudence (à Montpellier) vient remettre un peu la chose en question- confirment que l'usage du Peer-to-peer est bel et bien illégal.

Napster, Kazaa et autres 'gros' sont en disgrâce et les utilisateurs 'lambda' utilisent peu ou plus du tout le peer-to-peer pour deux raisons :

> peur du gendarme (sauf changement de loi, mais ne pas compter dessus car ça serait remettre en cause le principe même du droit d'auteur)

> difficulté de trouver un réseau d'échange qui fonctionne, avec une masse critique suffisante pour trouver ce qu'on cherche (de plus, tous ces réseaux sont de plus en plus pollués par des spywares et fichiers parasites de tous poils...)

Plusieurs acteurs du marché commencent à se positionner sur le téléchargement payant 'à l'acte'. D'Apple à Coca-cola, chacun essaie de prendre une part d'un gâteau qui devrait être juteux à terme.

Mais le point-clé est que les fournisseurs d'accès ont la possibilité technique de repérer un téléchargement de musique et d'agir en conséquence, et peuvent par exemple :

- couper le téléchargement en cours

- pénaliser l'utilisateur (amende ou autre)

- le dénoncier aux autorités


Aujourd'hui, ils s'en moquent parce que le marché du haut débit est encore en phase 'montante'. Dès lors qu'il ne restera plus que 3 ou 4 acteurs sur le marché et que la croissance du nombre d'internautes sera calmée (et c'est l'affaire d'1 ou 2 ans au maximum), les fournisseurs d'accès s'entendront pour des pratiques similaires au niveau juridique (c'est nécessaire) histoire de ne se battre commercialement que sur les services proposés.

Donc de toute façon, mis à part pour une ptite minorité de technophiles aguerris prêts à dépenser du temps et de l'énergie pour rester sur un modèle de Peer-to-peer, pour 99% des internautes, le Peer-to-peer gratuit est déjà du passé.

DEMAIN

Si on prend un peu de recul, le vrai enjeu est la dématérialisation des contenus. Il faut accepter qu'un contenu qui peut être transmis sans transmission d'un support physique ait une valeur.

Or, c'est déjà le cas pour deux contenus :
- les articles de journaux
- l'accès à des communautés (sites de rencontres, jeux en ligne)

Dans ces deux cas, on retrouve toujours les deux mêmes modèles :
- paiement à l'acte
- paiement à l'abonnement

Il est inexorable que ces deux modèles s'appliqueront un jour ou l'autre au téléchargement de musique.

Perso, je suis prêt à payer 10 Euros par mois pour avoir un droit de téléchargement illimité (la somme des abonnements ansi contractés étant répartis sur les auteurs + producteurs des auteurs des morceaux téléchargés). 10 Euros, c'est de toute façon plus que mon budget CD mensuel actuel...

Savoir quand ça se mettra en place dépend de la rapidité des maisons de disque à comprendre la mutation de leur métier et à s'adapter plutôt que de crier "au loup", ainsi que de la vitesse de consolidation du marché des fournisseurs d'accès.

Pour plus d'infos sur le sujet, consultez le très complet blog de Sylvie.

Christophe

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